samedi 21 mars 2015

Salles Fourmi et Vers voraces

Après la famille, c’est au tour des copains : les Salle-Fourmi … et oui, on ne choisit pas toujours son patronyme dans ce bas monde…
 La petite tribu laborieuse de Jérôme Kipu© et sa douce Isa Fourmi n’a pas quitté le Languedoc depuis de longues années, et c’est même la première fois que Lucas, 11 ans, et Rachel  prennent l’avion.


Le voyage prend, dès le lendemain de l’achat des billets, un air de « çapu-la-poisse » : Isa se fracture la cheville en rêvant sur le chemin – caillouteux et pentu - du travail … Pas question d’annuler ce vol tant attendu, de toute façon, une cheville flambée, ça ne devrait pas déranger, dans ce pays temple de la randonnée … et si jamais, avec un plâtre, il y a toujours l’option baignade, plongée qu’est compatible !
Si Isa a légèrement les boules, les enfants eux apprécient le nouvel et heureusement temporaire handicap : plus question qu’on les fassent suer avec nos journées marche ! Et c’est le bonheur des grandes familles : ça joue, ça cours, ça piaille, ça tchatche et ça rigole ; grande tablée où l’on se régale de riz-poissons capverdiens et de fromages français, qu’on digère en tapant le carton, équipe des « Zenflammées » contre les « Raisonnableufeurs » !

Février, mois du carnaval. Nina et son « école » ouvre le bal et nous donne un avant gout de la gestion et des goûts capverdiens : Pour préparer le petit tour de piste de cette petite trentaine d’enfants, il faut bien 30 mamans et 4 h … c’est vrai que découper et coller (sur un 4x4 Kipu) des fruits et légumes de magazine (le thème choisi par l’école), c’est long et compliqué, sans scotch ni ciseaux … 
Bref, à 13h, tout le monde est prêt, à part que les enfants ne ressemblent en rien à des fruits et légumes mais seulement à de petits princes et princesses dorés et qu’ils sont nazes : pas grave, la suite des « festivités » vaut le coup : nos chers bambins devront marcher pendant 1h derrière le 4x4, exhortés par la maîtresse pour chanter à plein poumons un hymne au carnaval, poumons qui respirent à plein nez les fumées du pot d’échappement et qui ne peuvent lutter pour se faire entendre : leurs petites voix sont couvertes par les hurlements du klaxon qu’émet avec force rythme et foi la bonne-sœur au volant.













Les autres écoles ne sont pas en reste et Jérôme se marre de voir les chinois se frotter les mains, des escudos plein les poches après les ventes records de Zorro, Maya l’Abeille et Spiderman, tout ça sous le couvert culturel de l’éducation nationale ! 
 
Porté par cette folle ambiance de carnaval, Imad se lance dans un atelier masque ; à base de feuilles palme et fruits de flamboyant, il invente des têtes d’animaux et fournit la matière à qui veut : Leïla, Lucas et Rachel se fabriquent des têtes d’éléphants et d’oiseaux rares, au milieu de tête de canard, cygne et loup. Ils sont magnifiques, et on attend avec impatience de défiler !



Le goût très Disney-kitsch des capverdiens se confirme lors du grand défilé, avec des chars célébrant « Blanche Neige », des hordes de transsexuels, des ballerines aux couleurs des opérateurs téléphoniques …. Et pas un regard pour nos masques si carnaval !!!


Impatiente de gambader et les épaules en feu à force de jambe en l’air, on confectionne une paire de tong spéciale handik pour Isa. Elle peut ainsi apprécier l’architecture capverdienne (qui émeut tout nouvel arrivant) la flore et la faune sauvage.


moutons, carcasses et habitations plus ou moins terminees font tout le charme de Tarrafal

La fleur typique du coin :Plasticus acacius

Mawashi

Après Tarrafal plage et Tarrafal center, on pousse vers TchoBom et les jardins jusqu’à Riberia Prata. Isa fait le trajet en taxi collectif et Jérôme s’intéresse aux cultures locales, ignames, taro, et bien sur canne à sucre qu’on croque et suce tout le long de la ballade.
Elle se boit aussi pas mal et les fonds de vallée accueillent de nombreux alambics, industrie – familiale – florissante, mais qui fait des ravages dans la population  … avec en plus chez les jeunes un accès à des drogues plutôt épicées – cocaïne, héro. Il semble que le Cap Vert soit une escale entre l’Amérique et l’Europe, d’où tous ces produits qui circulent assez ouvertement et à bon marché …
petite sieste ou coup de canne de trop ?








les jardins de Tchobon

les anciens aqueducs qui courent de Tarrafal a Ribeira Prata

Heureusement pour nous, une bonne Estrela (la bière locale) nous suffit, et on l’apprécie en retrouvant Isa chez Luis, après cette ballade un peu frustrante coté paysage. Gab nous a fait passer par d’anciens tunnels – creusés pour le passage de canalisations d’eau – et si c’est très ludique pendant un moment, de marcher dans le noir, le corps plié en deux pour les plus grands (pas moi !!) avec un pète au casque de temps en temps, une heure, c’est un peu long.










Entre deux tunnels, pose flotte et plein air

On apprécie le cadre de cette petite palmeraie nichée derrière une dune de sable noire, sable qui devient denrée rare au Cap Vert, tellement exploité pour les constructions tout béton ! Luis et son petit camping fait de matériaux de récup (dont des vieux canapés miteux et pleins de puces ???), de palmes, pailles et feuilles séchées diverses, nous assure le casse croute, et on digère dans ses vieux divans, fauteuils et balancelles.
Le coin de Luis vue depuis la plage

On visite le fameux camp de concentration de Tarrafal, encore un rappel de la désolante histoire de nos sociétés …  il a ete construit sous la dictature de Salazar, pour y incarcérer des hommes d’opinions diverses mais différentes des siennes, puis en 1960, il est transformé en camp de travail pour les « nationalistes Africains » d’Angola, de Guinée et du Cap Vert, qui commencent à s’agiter pour leur indépendance …

Isa non plus n'a pas de chance ...on pourrait dire que la poisse ne lui colle pas qu’aux basques –elle qui n’est pas basque – mais aussi à la peau – elle est de Pau … ok, ce n’est pas drôle, enfin pas sur le moment :
Le lendemain de son séjour sur la plage noire ou dans les canapés de Luis, elle se retrouve les bras, la poitrine et le dos, couverts de petits boutons, qui grattouillent.
Quelques puces ? Alors que le reste de la troupe arpente les montagnes de la vallée de Principal pour la journée, Isa s’attaque à un de ses boutons …. Arghhhh … elle en sort un petit vers blanc bien vivant. Dégoutée, elle passe donc le restant de la journée à se charcuter et c’est la mine déconfite qu’on la retrouve au petit soir…

Après la fracture, les vers voraces, et nous qui nous régalons en montagne, c’est trop injuste !

Heureusement pour elle, après une recherche sur internet (car personne n’a jamais entendu de cas comme ça ici), il s’agit juste de Vers de Cayor, qui se développent dans la peau, formant un bouton sans autre symptôme, et cela jusqu’à ce que s’envole une jolie mouche qui ira pondre ses œufs ailleurs … Frontale sur la tête et aiguille à la main, Jérôme s’attaque au dos de sa douce, et en expert, s’occupe aussi de Nina qui en a chopé juste un – de trop. Elle hurle à la mort quand il creuse à l’aiguille … comme Isa doit en baver !
Mais le moral remonte vite, et c’est tout sourire qu’elle se lève. Après le petit déj, petite tartine d’argile et on devrait rien y voir d’ici quelques jours. 

Pour les derniers jours, ils se feraient bien une petite sortie en mer, mais on hésite avec la Chkoumoune qui suit Isa … on pourrait encore couler ??? Allez, on tente le diable et nous voilà parti plein Sud pour Ribeira Barca. Petite nuit au mouillage, rando, pêche, et jeux de cartes, le vent de la poisse semble avoir tourné puisqu’on retourne sains et saufs à Tarrafal.  La dernière soirée à Praïa met quelques doutes à Jérome et Isa sur nos bonnes intentions : le super plan resto-musique qu’on leur avait vendu relève de la torture avec du batuque à 100 décibels pendant tout le repas … Entre le traditionnel de ce chant très percutant et le Disney-kitsch du carnaval, c’est plein de « bons » souvenirs qu’ils s’envolent vers le château de Roqueselles et ses paysans-vignerons.
Le Corcovado au mouillage a Ribeira Barca au petit 

Et nous, question fourmis, on commence a en avoir dans les jambes. Adieu Tarrafal et le Cap Vert, on décide de mettre les voiles pour les côtes africaines, direction la Gambie. On calme cependant nos ardeurs pour encore un mois puisque Aline et sa petite famille viennent nous trouver ici fin mars ... 

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